Paysage sur flocon de neige

Yevgen Nazarenko Université McGill

Quoi de plus pur qu’un flocon de neige? Délicate dentelle de glace à l’étonnante symétrie, ce cristal miniature incarne la perfection. Pourtant, si on scrute l’une de ses facettes à l’échelle nanoscopique, on constate que sa surface, loin d’être uniforme, est peuplée d’étranges structures. Çà et là, on devine la silhouette d’un sapin croulant sous la neige, une improbable épine de rose et, plus insolite encore, une éponge de mer ou même du corail. Or, on soupçonne certaines de ces structures d’être des contaminants, car les flocons de neige trappent, puis libèrent différents polluants atmosphériques. Voilà un examen nanoscopique inédit qui dévoile une facette inattendue des cristaux de neige… (Taille des impuretés : de 50 nanomètres à 1 micromètre - Grossissement 1200x - Microscope électronique à balayage) - photo issue du concours La preuve par l'image de l'Acfas édition 2017.

La formule des 3R

L’appropriation et la valorisation des évidences scientifiques imposent un dialogue entre les scientifiques et les consommateurs finaux dont les communautés rurales. En effet, cette communication avec les communautés que ce soit pour collecter des données, restituer les résultats d’étude ou sensibiliser pour l’adoption de bonnes pratiques obéit à certains principes. Ils sont résumés dans la formule dénommée les 3R.

(Se) Renseigner

Les communautés sont diverses et ne partagent pas toutes les mêmes façons de faire. Par exemple, dans mon pays la Côte d’Ivoire, il y a plus de soixante groupes ethniques et chaque groupe ethnique a une coutume qu’on ne retrouve pas forcément chez les autres. Cette réalité doit conduire à considérer les communautés dans leurs particularités. Pour connaître ces particularités, il faut se renseigner. Il y a beaucoup de choses à savoir sur les communautés mais quand il s’agit d’interactions, ce qu’il faut mettre en haut de la liste ce sont les codes culturels de communication. C’est-à-dire les pratiques d’une communauté pour créer un dialogue. Cela englobe le rite d’accueil, la façon de saluer, de se tenir et même de se vêtir.

En Côte d’Ivoire par exemple, dans certaines cultures, avant de demander de ses nouvelles à un étranger, on lui propose à boire de l’eau ou du vin de palme. Chez les Kroumen, ce sont des noix de cola à manger. L’étranger est supposé venir de loin et avoir besoin de reprendre des forces.  Mais dans d’autres cultures, c’est le contraire. Chez les Alladjan, on cherche à savoir le motif de la visite avant de donner à boire à un étranger. Pour connaître ces pratiques, il est bien de lire mais il est encore plus appréciable d’avoir un contact sur place et de faire des visites exploratoires.

Les petites histoires

2021. Je suis retenu dans l’équipe de consultants en charge de l’élaboration de la stratégie de communication de lutte en Côte d’Ivoire contre les maladies tropicales négligées à manifestation cutanée (lèpre, gale, pian, ulcère de Buruli). Pour la collecte des données, nous avons six districts sanitaires à parcourir et différents publics à rencontrer (jeunes, femmes, autorités sanitaires et coutumières etc.). La stratégie employée fut d’obtenir de la part du Programme national de lutte contre l’ulcère de Buruli un courrier nous permettant de nous attacher les services d’un infirmier dans chacun des districts à visiter. Ce dernier, nous a mis au parfum des réalités socioculturelles de sa zone. Il nous a introduit auprès des leaders communautaires. Nous avons effectué des visites exploratoires au cours desquelles, nous avons expliqué notre projet et promis de revenir ultérieurement pour nos enquêtes.

 

Respecter

Respecter, c’est accepter, considérer et ne pas juger les personnes, leurs façons de faire et d’être. C’est aussi faire preuve de transparence, chercher à comprendre et s’exprimer avec humilité et si possible, dans les mots et expressions de la communauté en question. Respecter, c’est également essayer de faire comme elle. Un proverbe de chez moi dit que si vous arrivez dans un village et que tout le monde marche sur la tête, vous devez en faire autant. Les questions viennent après. Respecter, c’est souvent ne pas visiter une communauté avec les mains vides. Il faut offrir des cadeaux symboliques aux chefs et dans la mesure du possible, accepter ce qu’ils offrent en retour. Respecter, c’est écouter attentivement, tenir ses engagements et faire preuve de patience face à ceux de la communauté à laquelle vous avez affaire. Enfin, respecter c’est ne pas chercher à imposer ses vues et sa culture mais chercher à dialoguer pour co-créer.

Les petites histoires

2022. J’effectue avec des collaborateurs venus de Suisse des visites de terrain. Objectif : s’enquérir des résultats de la mise en œuvre d’un projet d’autonomisation des femmes en milieu rurale. Avant d’entrer dans un village, je marquais un arrêt pour acheter des cartons de savon. Certains de mes collaborateurs me questionnaient sur la raison de cette action. Je leur avais répondu : « nous allons dans un village, des femmes ont laissé leurs occupations pour nous rencontrer et nous écouter. Ce serait irrespectueux de les visiter les mains vides, prendre auprès d’elles des informations et se retourner. »

Remercier

Dans beaucoup de communautés où j’ai eu à passer, il y a le reproche selon lequel des chercheurs ou organisations viennent, s’enrichissent des pratiques et savoirs des communautés et ne reviennent plus. Ne ne serait-ce que pour dire remercier ou partager avec elles le fruit de leurs recherches… Pourtant, c’est une démarche qui renforce la confiance. Si elle n’est pas mise en œuvre, elle peut susciter de la méfiance et fermer la porte aux autres chercheurs et communicants qui viendront ultérieurement. La confiance est un élément important. S’il n’y a pas la confiance, les communautés ne peuvent pas s’ouvrir et se confier.

Les petites histoires

2019. Je documente en photos des chaines d’approvisionnement en cacao et huile de palme. Après discussions, des cultivateurs sont favorables à l’idée de faire des photos dans leurs plantations. Quelques mois plus tard, j’imprime les portraits des cultivateurs en prenant soin d’écrire là-dessus : « MERCI ». Je suis retourné dans leurs villages respectifs et je leur ai remis leurs photos en mains propres. Que d’émotions!