Entre psychologie et communication, quel est le rôle de l’humour?
La polarisation des discours est maintenant un enjeu communicationnel majeur. Combinée à une crise de désinformation, les différents médias, les créatrice-teur-s de contenu et les porteur-se-s de messages doivent s’allier afin de présenter au public un message rassembleur, positif et engageant. J’adopte une posture unique dans ce contexte puisque mon créneau est de parler d’environnement, mais en utilisant l’humour et les préceptes de la psychologie de l’engagement. À travers des messages clairs, dynamiques et positifs, je stimule l’implication du public ciblé face à des enjeux environnementaux, principalement via des canaux de communication en lien avec les médias socionumériques.
L’humour au service de l’environnement
Sans se limiter uniquement aux sujets à saveur environnementale, l’humour se révèle puissant pour désamorcer dans certaines contextes scientifiques ou pour aborder des thèmes épineux.
L’utilisation de l’humour s’intègre de plusieurs façons dans ma pratique communicationnelle. D’abord, je prends conscience du rôle du public dans la transmission de mon message. Des questions peuvent nous aider à cibler si nous tirons meilleur parti de notre auditoire, notamment : suis-je en train de critiquer un tiers commun, ou la cible de mon message est plutôt contenu dans mon audience? Quel stéréotype mon message véhicule-t-il et joue-t-il en ma faveur ou défaveur? Ces questions aident à prédire comment sera reçu notre message et dirigent le processus humoristique à prioriser en fonction de notre cible.
Bien identifier le rôle du public dans notre communication est primordial, notamment en prenant conscience de son historique, ses perceptions actuelles, ses freins et motivations. En prenant compte de ces facteurs, il est possible d’ajuster les méthodes humoristiques dans le but de maximiser nos chances d’engagement.
Par exemple, imaginons la situation hypothétique suivante : un parc naturel se voit aux prises avec une problématique de gestion de déchets. Les usagers laissent traîner canettes et emballages près de feux de camp le long des rivières. Une campagne d’engagement citoyen est lancée, où une poubelle affichant un débat ludique comme « Pour ou contre le ketchup sur la poutine » ? est présenté. La poubelle affiche « Tries un déchet pour voter » et la quantité de déchets est comptabilisée pour divulguer les résultats du vote via une affiche sur média socionumérique ou sur place.
Dans une même thématique, un Cégep nous approche pour nous mentionner que les étudiant-e-s trient mal les déchets et les poubelles sont ainsi contaminées. Une campagne vidéo est mise en place lors de l’activité d’halloween dans l’Atrium. Un code QR pointe vers une vidéo humoristique où le personnage vocifère des propos dans un décor glauque à tou-te-s celles et ceux qui trient mal leur déchet. Un jeu est ensuite organisé où les étudiant-e-s doivent mettre leurs mains dans des bacs mal triés et extirper des déchets parmi de faux détritus gluants ou sales. Une brève sensibilisation explique que le travail de tri des matières au centre est fait par des humains également, amené avec positivisme et engagement.
La psychologie de l’engagement, un outil notable
La psychologie de l’engagement étudie les moyens par lesquels un individu se sent engagé dans un comportement ou processus. Elle détaille les méthodes pour stimuler une action ou un changement de discours interne.
En plus de l’humour, les méthodes propres à la psychologie de l’engagement s’avèrent être un outil majeur en termes d’engagement et de motivation. Une fois que le sujet est désamorcé et introduit grâce à l’humour, il est possible de stimuler l’engagement du public par différents moyens.
Ces techniques modulent la perception que le public a de ses propres actions et orientent les comportements vers des buts précis (nudge en anglais). Il est d’ailleurs possible d’évaluer les retombées concrètes de nos outils communicationnels en mesurant la différence entre un public introduit à une méthode engageante, par opposition à un public témoin. Des ouvrages tels que le livre Nudge de Richard H. Thaler ou La soumission librement consentie par Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois présentent de bonnes amorces pour ces concepts.
Le choix des mots
En plus des moyens mentionnés ci-dessus, un outil redoutable dans le domaine de la communication environnementale est le choix des mots dans chaque message. Quoi de plus pertinent et efficace que des mots qui créent un sentiment d’appartenance et qui outillent l’audience visée? Avec un sujet aussi polarisé que l’environnement, adapter son langage permet aussi d’éviter de braquer le public et rend le sujet plus accessible. La vulgarisation fait partie du processus, mais également la linguistique et la psychologie.
En combinant différentes méthodes, il est possible de simplifier, améliorer et standardiser la communication en matière d’environnement ou d’autres sujets épineux. En dosant l’humour et en utilisant des mots qui facilitent la compréhension, le public s’identifie davantage au message, permettant de gagner la confiance de l’auditoire. Et de l’amener à moduler ses comportements et points de vue plus positivement et de son plein gré.