Îlots sur les flots

Morgan Botrel Université de Montréal

Ces îles flottantes sont composées d’amas enchevêtrés d’algues filamenteuses (chlorophytes) recouvrant des plantes aquatiques submergées. Une scène inusitée croquée au lac Saint-Pierre, un élargissement du fleuve Saint-Laurent. Deux semaines auparavant, les îlots étaient absents. Une baisse rapide du niveau de l’eau les a fait émerger. Une telle apparition soudaine témoigne du fait que les herbiers aquatiques sont soumis à des conditions extrêmement variables. Ces habitats rendent divers services, notamment la rétention et l’élimination des polluants dont les nitrates, le sujet à l’étude ici. L’image suggère que la capacité d’épuration de tels habitats dépend davantage des algues microscopiques associées aux plantes que des plantes elles-mêmes. (Photographie numérique prise à partir d’une chaloupe) - Image issue du concours 2023 La preuve par l'image de l'Acfas.

Apprendre à se mouiller, une vague à la fois

Peut-on se noyer dans les possibilités?

Et bien c’est ce qui a failli m’arriver quand j’ai trempé pour la première fois le gros orteil dans l’océan de la vulgarisation scientifique.

Chaque format comporte ses codes, ses défis, son public, mais aussi… ses plaisirs! Comment alors se motiver à plonger vers l’inconnu tout en évitant la noyade? Dans ce court texte, je vous partage quelques principes et astuces qui m’ont aidé à surfer sur les différentes vagues de la communication scientifique.

Faire le grand saut : un besoin de partage

À travers mon parcours académique, j’ai développé une passion profonde pour mon sujet de recherche : les milieux humides. Pour moi, ce sont des écosystèmes extraordinaires qu’on ne peut s’empêcher d’aimer. Mais pour la majorité des gens, ce sont des trous d’eau puants remplis de maringouins. À l’époque, le seul format de communication que je connaissais était celui qui m’avait été enseigné : les monologues avec diapositives devant des pair•es. C’est donc le besoin de partager ma passion de façon créative qui m’a poussé à me renseigner sur d’autres formats. Je me suis demandé : à qui je pouvais m’adresser, et surtout, comment?

Au ras des pâquerettes : une leçon d’humilité

La première vague que j’ai attaquée s’est présentée sous la forme d’un emploi en animation scientifique auprès des enfants. Et c’est un format bien plus compliqué qu’il n’en a l’air! Je suis descendu très vite de ma tour d’ivoire universitaire pour recevoir quelques leçons d’humilité au ras des pâquerettes! Aucun public n’est plus sincère que les enfants : si vous les ennuyez, vous le saurez bien assez vite! La plus grande leçon que j’ai retenu de ces expériences, c’est l’importance d’adapter son discours à son public. Par discours j’entends le vocabulaire, la longueur des phrases, l’intonation et même la formulation. C’est aussi avec les tous petits que j’ai appris à raconter une histoire, un concept clef en vulgarisation qui revient dans tous les formats.

Lumières, caméra, action : une formation technique

Après mes aventures avec mes jeunes cobayes, je suis allée surfer sur le web, dans le monde de l’audio (La symphonie des milieux humides) et de la vidéo. Et dans le vaste océan de la vulgarisation, ce sont probablement les vagues les plus intimidantes. Le choix d’équipement, le montage, écrire un script, avoir l’air naturel, moduler sa voix, sur quelle plateforme publier… tant de paramètres à gérer pour faire flotter le navire et arriver à bon port! C’est donc à travers ce format que j’ai appris l’immense importance de la formation. Tout comme je ne suis pas devenue biologiste en tombant dans un milieu humide, on ne devient pas vidéaste en s’achetant une caméra, aussi technologique soit-elle.

Les vrais outils, ce sont ceux qu’on acquiert en allant à la rencontre des personnes expertes lors d’activités de formation. Et si j’ai retenu une chose de ce partage, c’est que la perfection n’existe pas. Vos premières vidéos ne seront pas dignes d’un film de Spielberg, mais il faut se mouiller pour apprendre à nager!

Dans la peau du caméléon : un changement de perspective

Ce qui m’aura le plus changé en tant que communicatrice, c’est la vague d’opportunités qui est venue après ma participation au concours Ma thèse en 180 secondes. J’ai reçu de nombreuses demandes de conférences auprès de divers groupes avec des préoccupations spécifiques. J’avais donc déjà leur attention, mais je devais m’assurer que ma communication réponde à leurs besoins. C’est là que j’ai appris l’importance de l’approche caméléon : il faut se mettre dans la peau de son public et reconnaître nos biais de personnes expertes, car notre audience n’a pas le même bagage. Chaque fois que j’offre une conférence, je me questionne donc sur les enjeux, les connaissances et les intérêts de mon audience, mais je les questionne directement aussi avant de commencer! Sonder son public, c’est comme planifier son départ en mer avec son équipage. Le voyage est plus agréable pour tout le monde.

Choisir son cap : un voyage personnel

Après toutes ces aventures à travers les vagues de la communication scientifique, je me suis tout de même demandé où est-ce que je me dirigeais avec tout ça? Quel cap devrais-je suivre avec mes communications? Et la réponse vous semblera peut-être fleur bleue, mais je compte aller là où le vent me portera! Car c’est bien là la beauté de diversifier ses approches : on peut naviguer aux quatre coins de l’océan de la vulgarisation scientifique, sans craindre de se faire avaler pas un tsunami. À tous les matelots qui se lanceront dans ce voyage personnel, je vous dis : soyez curieux, partez vers des horizons qui vous interpellent et surtout, n’ayez pas peur de plonger! Parce que pour apprendre à surfer, il faut commencer par se mouiller.