La communication scientifique : un art à pratiquer avec rigueur
La mission des scientifiques ne se limite pas à la production de connaissances, mais inclut également leur valorisation et leur partage avec le public. En effet, une découverte scientifique a-t-elle autant de valeur si elle reste enfermée dans un tiroir ou un fichier d’ordinateur? Cependant, la communication scientifique est une discipline qui doit être pratiquée avec soin et en respectant certaines règles.
Choisir le sujet de communication
Le choix du sujet est l’essence même de la communication scientifique. Tous les sujets scientifiques peuvent être communiqués, mais le succès de la communication dépend notamment de l’angle et de la façon dont le sujet est présenté. Par exemple, pour présenter la biodiversité végétale, il est plus captivant de raconter une histoire derrière une espèce, telle que son utilisation dans l’histoire, son importance dans l’écosystème ou comment elle peut remplacer un produit de la vie quotidienne. Cette pratique, bien que comportant certaines limites, s’appelle la mise en récit (storytelling) et elle est très efficace.
Répondre aux besoins du lectorat
Un sujet scientifique doit également répondre à un besoin du lectorat, connu ou inconnu. Il est essentiel de considérer le degré de connaissance scientifique des citoyen qui serait généralement comparable à celui d’un élève d’une dizaine d’années sur la plupart des sujets. Ainsi, il est important d’adapter le contenu à la majorité des publics cibles, sans jugement et en utilisant des phrases courtes. La communication scientifique utilise diverses techniques telles que l’explication, l’analyse, le décryptage, la narration et l’argumentation. Chacune d’entre elles convient à un sujet défini dans un contexte précis. Parfois, il est préférable d’analyser les résultats et de les comparer, tandis que d’autres sujets demandent une argumentation ou encore un décryptage des faits. Toutes ces techniques servent finalement la mise en récit. Les plateformes de diffusion physiques et numériques sont des éléments clés à ne pas négliger.
Les réseaux socionumériques (Instagram, Twitter, Facebook, YouTube…), les cafés, les restaurants, les sites web, les écoles et les entreprises sont d’excellents vecteurs de communication scientifique, chacun ayant un format différent adapté aux attentes du public ciblé.
Enfin, la communication orale peut être plus efficace dans certains cas car elle implique la dimension non verbale, qui représente une bonne partie de la communication humaine. Il est important de prendre en compte l’apparence, la posture et les exigences d’espace pour garantir une communication réussie [en savoir plus].
L’expérience au pays du cèdre
Au Liban, la communication scientifique est un terrain difficile à parcourir. Le fossé entre la société et les scientifiques est immense. Les adultes semblent parfois peu intéressés par les sujets scientifiques et les jeunes ne sont pas suffisamment sensibilisés à la production de recherche locale de qualité. La barrière de la langue est également un obstacle important. Avec trois communautés linguistiques distinctes (anglophones, arabophones et francophones), la diffusion du savoir scientifique devient un exercice complexe, mais pas irréalisable! Le contexte économique et social du pays représente également un frein pour la communication scientifique. Les avancées scientifiques sont souvent éclipsées par les problèmes sociaux et économiques qui préoccupent la population. La sensibilisation de la population aux sujets scientifiques est donc un défi de taille dans un contexte où la situation est déjà préoccupante. Le manque de journalistes scientifiques professionnels formés au Liban complique la communication scientifique . Une amer réalité qui doit être corrigée pour que la science et ses avancées soient diffusées efficacement auprès du grand public. C’est d’ailleurs l’une des priorités du Conseil National de la Recherche Scientifique Libanais (CNRSL). Les savoirs et leur valorisation sont un vecteur de développement et de progrès pour la société libanaise. Il est donc crucial de trouver des moyens de sensibiliser la population aux enjeux scientifiques et de promouvoir une culture de la recherche. Le CNRS libanais ainsi que l’AUF Moyen-Orient ont organisé par exemple de novembre 2022 à février 2023 une série de formations sur la médiatisation scientifique afin d’initier les journalistes et les scientifiques à la communication scientifique. La faculté des sciences de l’Université Saint Joseph de Beyrouth, propose aussi à ses jeunes scientifiques des cours en journalisme et popularisation scientifique. Ces initiatives permettent de sensibiliser à l’importance de la communication scientifique et de se former à cette pratique.
Personnellement, je travaille corps et âme au quotidien pour partager le savoir scientifique, par exemple dans mes réseaux socionumériques ainsi que dans mes articles journalistiques. Mais aussi partout autour de moi : au supermarché, dans les cafés, dans les écoles où je donne des interventions, durant mes formations… Et surtout je sensibilise les scientifiques sur l’immense importance de la communication de leurs productions scientifiques. Je suis passionné de biodiversité et je transmets ma passion et mes connaissances dans ce domaine à un maximum de personnes pour leur ouvrir les yeux sur la beauté du pays qu’il faut préserver. C’est ma mission de scientifique libanais de redonner aux gens confiance en la science afin de permettre à la société de fonctionner et d’évoluer de façon saine.